Négociations commerciales et consommateur américain
Au début du mois d’octobre, un mouvement de panique a frappé les marchés. Partout dans le monde, les indicateurs manufacturiers basculaient en territoire négatif, ravivant les craintes d’une récession imminente. En quelques jours, les indices boursiers abandonnaient plus de 5%, laissant augurer d’une fin d’année difficile. Mais très vite, la donne a changé, car Donald Trump et Xi Jinping ont réagi. Réalisant sans doute que leur bras de fer commercial venait à bout de la résistance des agents économiques et financiers, ils ont apparemment décidé de s’entendre a minima afin de pouvoir révoquer rapidement l’ensemble des récentes taxes douanières.
Cette nouvelle crédible a redonné de l’appétit aux investisseurs et les indices actions mondiaux ont pu rapidement rattraper leur retard. Puis, ce sont les nouvelles encourageantes sur le Brexit, la bonne saison des résultats d’entreprises, une petite baisse des taux américains et surtout la confirmation d’un marché de l’emploi dynamique aux Etats-Unis qui ont pris le relais. En réalité, tant que le consommateur américain va, tout va. Les indices actions terminent donc le mois en hausse d’environ 2%, tout comme l’or, alors que les obligations corrigent légèrement (-0,5%).
Ce mois-ci, nous partageons avec vous une analyse très intéressante des équipes de la Financière Arbevel (fonds Pluvalca). En se demandant, s’il faut revenir sur les marchés actions européens, ils nous rappellent des tendances de long terme qu’il est utile de garder à l’esprit.
« Pourquoi revenir sur les marchés actions européens ?
Car l’environnement est moins dégradé qu’il n’y paraît. »
Financière Arbevel
• La récession manufacturière en cours a sans doute touché un point bas
Une amélioration de la dynamique industrielle nous semble possible. La guerre commerciale a connu une phase d’accélération au cours de l’an passé. En effet, l’Europe semblait d’abord être seule à souffrir tandis que les économies chinoise et américaine paraissaient en bonne santé en début d’année. Ce contexte ne nécessitait pas la conclusion rapide d’un accord. Depuis quelques mois, la situation s’inverse et ce sont désormais les économies américaine et asiatique qui sont scrutées à la loupe par les investisseurs. Désormais, les négociateurs semblent bien plus motivés pour arriver à un accord commercial. Avec une guerre commerciale en cours et de grandes difficultés sur le secteur de l’automobile, le secteur industriel « tire la langue ». Pourtant, avec des effets de base désormais bien plus faciles, le secteur automobile devrait se reprendre, inversant ses effets indirects (entre autres sur le segment des semi-conducteurs).
• Sa diffusion au reste de l’économie s’affaiblit inexorablement
Certains s’étonnent de la résilience de la croissance des services face à la dégradation des secteurs manufacturiers. Ils oublient sans doute un changement structurel des dernières années sur le marché du travail : le vieillissement de la population entraîne une baisse structurelle du chômage. Avec deux retraités pour un arrivant sur le marché de l’emploi, le rapport de force apparaît désormais à l’avantage du salarié, comme nos rendez-vous avec les entreprises le confirment.
Sans plans de licenciement massifs, la consommation se tient bien, et explique la divergence entre le PIB manufacturier et celui des services.
• Le secteur des services connaît une mutation qui amortit les cycles
De plus, l’évolution du secteur des services est lui aussi sociétal. En migrant vers un fonctionnement massif par abonnement (Netflix, Spotify, Windows 365 etc…), les dépenses sont de plus en plus récurrentes. Ainsi en cas de période économiquement moins faste, la résilience est nettement plus forte et les cycles moins violents.
Ce mode de fonctionnement crée une plus forte lisibilité sur les prix, une concurrence accrue, et en conséquence de la déflation.
Il faut donc accepter l’hypothèse d’une croissance durablement plus faible, moins cyclique, et une inflation limitée. Et ainsi investir sur des sociétés ayant une vraie valeur ajoutée et du « pricing power ».
• La relance budgétaire sera verte
Les relances quasi-mensuelles de la Banque Centrale Européenne n’y font rien. Malgré des taux très bas (voire négatifs), les états ont refusé de s’engager vers une relance budgétaire massive.
Rien de très surprenant, les états qui en auraient l’utilité n’en ont pas les moyens (Espagne, Portugal, Italie…) et ceux qui en ont les moyens ont du mal à l’envisager (pour les allemands, l’économie est massivement liée aux exportations… qui sont bien sûr moins faciles à relancer par le biais budgétaire sauf à subventionner les consommateurs étrangers …).
La donne semble être en train de changer structurellement en vertu de deux éléments :
- Les acteurs commencent à acter des taux longs très bas sur le long terme, donnant une lisibilité aux réformes,
- Les mentalités sur le changement climatique évoluent à une vitesse inattendue.
Après tout, comment expliquer à un jeune en Europe qu’il ne faut pas emprunter à taux négatif pour la transition énergétique ? Le concept de dette semble si faible face à l’habitabilité de la planète…
En conséquence, une bonne surprise liée à des plans de relance environnementaux de plus en plus importants doit être envisagée.»
L’équipe de gestion collective (Arbevel), le 17 octobre 2019